Au fin-fond de l’Auvergne se trouve un lieu-dit répondant au nom de Chauviat. On y accède par des routes sinueuses pour tomber sur un bourg d’exploitations agricoles, et pour cause, nous sommes accueillis sur les terres de Christian, agriculteur fraîchement retraité et passionné de tir à l’arc…
J’aurais pu la faire plus courte, j’avais d’ailleurs commencé un post pour les réseaux sociaux et puis je m’suis dit que j’avais tout de même des choses à dire (encore), et que les amis auvergnats méritaient bien une dédicace dactylographiée. Je pourrais aussi commencer par les résultats en bref, mais j’ai envie d’écrire. Prenez le temps, un p’tit café, un p’tit thé, et lisez tranquillement.
L’histoire commençait il y a quelques années déjà. Les archers des sources n’en étaient pas à leur coup d’essai pour organiser un parcours, ou deux, ou un championnat régional comme ils l’ont fait il y a tout juste un mois.
Une association est née : « le beau repère des archers », et c’est actuellement un terrain permanent de tir 3D qui est accessible à tous, toute l’année ou presque. L’asso a d’autres projets, les passionnés ne manquent pas à l’appel et peut-être que des cibles campagne seront prochainement mises en place pour s’entraîner, ou simplement se faire plaisir avec vue sur la chaîne des Puys.
A défaut de trouver un organisateur pour les championnats de France campagne, les Archers des Sources ont répondu à l’appel d’urgence des archers de parcours en prenant cette organisation pour le ELITE et pour le CATEGORIE sur deux weekends d’affilée. En cinq mois, si je ne dis pas de bêtise (pas trop), ils ont rendu la chose possible et c’est une sacrée performance considérant les enjeux et les besoins.
Les Archers des Sources ont organisé un très beau parcours, avec des situations qui demandent expérience, concentration et précision. C'est une belle équipe qui nous a offert ce championnat, on ne peut que les féliciter, et les remercier chaleureusement pour la sueur laissée alors qu'ils n'avaient que quelques petits mois pour rendre la chose possible. Merci au président Laurent Gaillot et à toute son équipe pour cette belle prestation !
Les voies ouvertes étaient nouvelles, proposant des contrastes ombre et lumière, dévers, pentes, couloirs, plaines et bois. Certaines cibles demandent un peu de jugeotte, même pour une distance connue et c’est ce que nous aimons ! Je n’ai vu qu’un seul parcours ainsi que les modules de matchs, mais globalement, nous étions sur un tracé équilibré. Ni facile, ni difficile, juste ce qu’il faut pour passer toute une journée à rechercher la performance, sans se péter une cheville avec un sac à dos de 8kg et un arc de 5kg à la main.
C’est rassurant de voir que la course à « qui fera le championnat le plus difficile » s’arrête, et j’espère que cela sera pérenne. Pour les parcours de cinglés, mieux vaut prévenir en amont afin d’éviter ce qu’il s’était produit en Chartreuse, et proposer ce genre de compétition hors championnat (en sélection par exemple).
Sur ce championnat de France élite, nous sommes 16 arcs à poulies hommes. Je décroche la médaille de bronze🥉 alors que la concurrence est talentueuse et affûtée. Je suis très content de ce résultat après une saison 2025 à la troisième place du classement national avec des scores à 416, 415 et 414 points. Nicolas GIRARD est champion de France, Sébastien ARMANINI est en argent.
Dans le détail, c’est une égalité parfaite avec Nico Girard sur les qualifications à 415 dont 56x6, 15x5, 1x4 points, pour la tête de ce championnat. Je perds le départage du classement "à la pièce de l’arbitre" pour figurer dans le second tableau. On est d’accord, ça ne change pas grand-chose.
Puis des matchs à 105 et 103 sur 108 points en modules de six cibles, et enfin 66 et 68 sur 72 points en modules de finales de quatre cibles. C'est encore une égalité parfaite sur le total des scores du weekend entre Nico et moi, nous avons terminé le jeu par un shifumi que je remporte avec ciseaux contre papier. L’honneur est sauf, #gamin !
Je n'ai juste pas tiré les scores dans le même ordre : en demi-finale je rencontrais Sébastien ARMANINI qui nous sort un score dément dans ce vent de plaine joueur (68 à 66, birdie-20 / gaze-30 / 60 à 40m / 80 à 55m) pour l'accès en finale. Nico et Sébastien auront produit un match très serré pour le titre 67/66 et c'était vraiment chouette, bravo les gars ! Je remporte ma rencontre avec Joan Pauner avec 68/59 points pour monter sur la troisième marche du podium.
Sportivement parlant, je suis très content de cette performance, de mon matériel, de mon niveau technique, alors que mes semaines sont extrêmement denses depuis mes nouvelles responsabilités. Cela ne doit pas m’empêcher de parler de ce qui m’irrite de plus en plus, et je veux parler du format de la compétition.
Après plus de quatre heures d’attente à l’issue des matchs du matin, il faut recommencer le tir par une demie finale et son enjeu, sans échauffement depuis plus de deux heures, par un birdie 20m, gazinière 30m, ø60 à 40m et ø80 à 55m. Ce sont les distances « taquet » pour les deux premières cibles, en plein vent, plein cagnard.
Outre la performance même des deux archers qui se tirent la bourre pour gagner la place en finale, il existe aussi la prestation potentiellement médiocre aux yeux du public. Il sera forcément déçu de ne pas voir comment les meilleurs tirent leur épingle du jeu. Les conditions mises en place ne seront pas idéales pour la démonstration du beau tir à l’arc, pour la sportivité du match, mais encore pour donner envie à l’archer de revenir sur un tel format.
Et c’est mon cas.
Le format de compétition changeait encore pour ne plus "protéger" les deux premiers classés des qualifications, et les tableaux de matchs redeviennent simple à comprendre. Ne me demandez pas d’expliquer plus précisément le format précédent, j’en suis incapable.
On entrait à froid dans le système des matchs face à un adversaire ayant tiré les modules le matin. J’ai fait partie des deux premiers des qualifications, et j’ai eu le sentiment d’être puni. Je viens pour faire du tir à l’arc, pour le consommer, du matin au soir, à tirer, du mieux possible. Avec ce précédent format, les deux meilleurs restent à l’hôtel, ou attendent quelque part en errant sur le site du championnat.
Cette année, la protection n’existe plus et le format colle à celui du TAE international, du FITA, où le premier rencontre le dernier du classement qualificatif. Innovation : zéro, plaisir : zéro, pertinence : zéro. Les qualifications restent les mêmes, les modules de matchs restent les mêmes par six et par quatre, les distances restent inconnues pour la moitié du parcours.
Je n'aime ni l'un, ni l'autre.
J’ai fait quelques statistiques, histoire de mettre des chiffres sur mon ressenti de ces formats de compétitions, en prenant appui sur le championnat de France ELITE à Chauviat.
Programme du jour 1
06h00 : réveil
06h30 : petit déjeuner
07h00 : trajet 30’
07h30 : montage de l’équipement, rejoindre le terrain 30’
08h00 : échauffement 45’
10h00 : début des tir pour 24 cibles / 72 flèches.
15h30 : fin de la journée, papote, stands.
18h30 : douche, repas entre archers de divers coins de France.
22h30 : dodo.
Total jour 1 :
5h30 de tir en continu, pour 7h30 de présence hors « extra ».
72 flèches comptées pour tout le monde.
Aucune attente (ou insignifiante).
Programme du jour 2
05h00 : réveil
05h30 : petit déjeuner
06h00 : trajet 30’
06h30 : montage de l’équipement, rejoindre le terrain 30’
07h00 : échauffement 40’.
07h40 : boucle 1, 18 flèches en 45’.
09h20 : fin de boucle 1 (retard 50’).
10h15 : boucle 2, 18 flèches en 45’.
11h00 : fin de boucle 2.
12h00 : entraînement disponible.
13h40 : fin d’entraînement, début des demi-finales toutes catégories.
15h20 : début demi-finales arcs à poulies hommes, 12 flèches en 30’.
16h10 : petite finale et finale, 12 flèches en 30’.
17h15 : cérémonie des médailles, longue.
18h45 : apéro.
Total jour 2 :
2h30 de tir par salve de 45’ maximum, pour 10h de présence sur site.
60 flèches comptées, uniquement pour les 4 meilleurs de chaque catégorie.
6h30 d’attente cumulée.
Définitivement, les chiffres collent à mon ressenti : ce format est dépassé. Le ratio le plus fou est celui de l’énergie dépensée par les bénévoles du club organisateur qui se la donne à fond jour et nuit pour rendre cette seconde journée la plus fluide possible, l’énergie dépensée par les arbitres et officiels pour établir les tableaux, suivre les résultats, tenter de tout comprendre dans un règlement devenu indigeste… et celle des compétiteurs, qui passent 65% du temps passé sur site à attendre. Forcément, y’a de quoi râler tellement les deux vitesses s’entrechoquent.
Pour les plus grosses catégories, 25% de la population présente tirera toute la journée n°2. La moitié des archers perdront au premier tour après 18 flèches tirées et auront le choix de rentrer chez eux dès 10h du matin, ou attendre les finales se déroulant cinq heures plus tard (sous réserve que celles-ci soient visibles, et dans de bonnes conditions). Ça ne donne pas vraiment envie de traverser la France.
Le site se vide rapidement de ses archers et c’est bien triste. Avant, cela se produisait lorsque les cérémonies protocolaires allaient débuter, maintenant, c’est de plus en plus tôt.
Compétition d’accord, mais pourquoi cette volonté de coller au format international ? Pour préparer les équipes de France ? Pour cela, sélection et stages existent, ou ont existé. Pourquoi imposer ce format à plusieurs dizaine de milliers d’archers alors que cela ne concerne qu’une poignée de sélectionnés ? J’ai maintes fois fait partie de l’équipe de France FITA, salle, TAE… Les championnats de France ne m’ont pas apporté grand-chose pour me préparer à l’international.
Les déplacements coûtent très chers, autant faire en sorte de les rentabiliser. L’absurde en vient jusqu’à proposer par exemple, pour rester dans le domaine du tir en campagne, le championnat de France par équipe de club avec un total de 12 flèches tirées par archer pour ce championnat. On marche sur la tête. L’argent ne tombe pas du ciel, l’énergie des bénévoles non plus. Consommer autant d’énergies pour un nombre si faible de flèches tirées, de temps passé, d’archers concernés, c’est la petite mort assurée.
Si je fais mon américain, je compare mon investissement avec une compétition comme Redding aux USA. On peut aussi le faire entre Las Vegas et Nîmes pour le tir en salle.
Redding coûtera dans les 2000€ aller-retour avion-voiture-hébergement et inscription, pour un total garanti de trois jours de tir, 140 flèches comptées en 70 cibles, un village de marques, un stand de réparation, une immense buvette, de vraies toilettes et points miam / boissons fraîches toutes les cinq cibles. En supplément, le show final, une compétition par équipe incluse dans le format, ainsi qu’un fun-shoot de 14 cibles qui précède les trois jours de compétition, et un parcours libre le jour d’avant. Tout ceci est garanti pour 100% des participants qui paient en échange 175 dollars pour plus de 200 flèches tirées. Vous ne serez pas recalé au contrôle matériel, car tout est autorisé, seules les règles de sécurité et une poignée d’informations sont à observer.
Pour nous ayant à traverser l’Atlantique, cela représente 10€ par flèche tirée. Pour un local ouest-américain qui va parcourir à quelque chose près les mêmes distances que nous et qui possède sa propre voiture, cela représente un budget de 800€ au maximum et donc, 4€ par flèche.
Un France campagne à 600km de chez soi (je coupe la France en deux), donne 1200km parcourus. Tout frais compris, on atteint rapidement un championnat aux alentours de 600 à 1000€. La flèche tirée nous coûte dans les 11€ pour les perdants au premier tour, et 7€ pour les finalistes.
Les chiffres peuvent facilement varier, notamment si l’on doit rester deux weekends sur place, ou refaire le trajet une seconde fois pour faire le championnat jeune, l’élite, le catégorie, et ce, multiplié par le nombre de disciplines pratiquées… Les budgets explosent, le nombre de pages du règlement FFTA / WA aussi, mais l’expérience passée sur site se dégrade de plus en plus au détriment du nombre de flèches tirées et de l’ambiance générale.
Évidemment je n’ai pas de solution « clé en main ». Toutefois je pense à certaines options comme l’ancien format de matchs où les seizièmes gardaient les huit meilleurs scores, puis en quart les quatre meilleurs, sur des modules de six cibles. A l’issue de ces modules seulement, les matchs par binôme 1 contre 4 et 2 contre 3 formaient les demi-finales. Les meilleurs scores étaient forcément en tête pour une ultime prestation. Mais on reste sur un format match, et ce n’est pas ce que je préfère dans le tir en campagne, sincèrement. Ce format limite aussi une rencontre à deux adversaires.
Alors j’imaginais autre chose : un premier jour avec le parcours de 24 cibles connues et inconnues, le standard habituel. Un second jour avec un parcours de 12 cibles en matinée, avec une arrivée type QG où un pointage des résultats intermédiaires s’opère. Un nouveau classement est établi, avec un redistribution des pelotons pour faire partir les meilleurs en dernier sur un dernier module de six cibles.
Les six dernières cibles pourraient alors être médiatisées, filmées, photographiées, suivies par le public. On peut mettre de l’inconnue, de la connue, des angles, tout ceci en suivant les archers de même niveau de performance. La bagarre serait ainsi visible sur les mêmes panneaux de résultats que nous arborons dans le format actuel, mais entre au moins quatre archers du même peloton. Au moins, car rien n’empêche aux archers des autres pelotons de revenir au score… Les retournements de situation peuvent être nombreux et vraiment sympathiques à suivre, ou à vivre !
Le nombre de cibles est ici un exemple bien entendu, il peut s’adapter à la difficulté du parcours, au timing, pour ne pas créer de lenteurs. Avec un module de six cibles pour le run final, cela représente autant de pelotons en départ simultanée, donc 24 archers. Le drainage peut être rapide. Mais quitte à changer de formule, ce nombre peut être adapter au timing, au nombre d’inscrits, pour diminuer l’attente au maximum. Avec 12 et 6 cibles, nous avons une petite pause de redistribution entre 12h30 et 13h30, le temps de casser la croûte et de faire une pause toilettes.
Au total du weekend, 100% des archers tirent l’intégralité de la compétition et rentabilisent leur déplacement, leur investissement, pour un total de flèches tirées de 126. Selon le parcours, ce chiffre peut augmenter à un double 24 cibles pour tirer 144 flèches comme cela se produit lors des France par catégories. Ce format par catégorie est selon moi le meilleur actuellement, il faudrait juste que les dernières cibles permettent de suivre les résultats en cours pour vivre l’émotion sportive des dernières flèches avant le titre de champion de France.
Voilà, la saison se termine pour moi. Je vais prendre quelques jours de tranquillité avant de reprendre mes arcs pour divers tests sur les câblages, les accessoires, les configurations diverses et en apprendre davantage sur ce HOYT CONCEPT X. Un arc fabuleux, qui me réapprend les bases du tir à l’arc, les choses simples et logiques. Mon équipement ARC SYSTEME vieux de cinq années, va suivre mon protocole d’entretien de fin de saison pour continuer à performer. Chaque année, mon équipement #AS passe au comparateur et à ce jour, aucun dixième n’est manquant, le fonctionnement et les mouvements sont optimaux. C’est un sacré confort de faire confiance à son matériel, je suis fier de représenter ces marques de qualité.
Je vous souhaite de très bonnes vacances, ou bien de très bons championnats pour les campagnards restants, et les 3Distes, ou bien un bon mois d’août au travail (entrecoupé de quelques BBQ peut-être ?) et je vous retrouve à la rentrée pour une nouvelle saison riche en nouveautés et en contenus pour notre passion commune.
Archerycalement,
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Article publié le 07/08/2025
Crédits photos : Bastien Lemaire, Clément Corbet, Fanny Fernandes.
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