Shanghai, pas mal ;-)

IMG 5624Vous avez suivi le départ, puis les premiers résultats avec plus ou moins de retard du fait des *six heures* (prononcez ciseuuuuurrr svp, c'est plus classe) de décalage horaire. Plus ou moins car certains ce sont levés très tôt pour nous voir sur Youtube Archery TV, ou sur World Archery pour les résultats. Les matchs ont eu lieu et le bazar commençait sur les réseaux, j'en avais de partout, c'est bien !

 

IMG 5682 IMG 7011 Pas mal ;-)  

Vous avez été forts, sur les partages, les commentaires, les "likes", les messages... sur cette semaine chinoise lors du lancement de la saison de la coupe du monde à Shanghai. Pas mal, pour une reprise internationale, vous avez une belle réactivité, je pense que je vais vous garder #BigSmile :-)))) !!!

Vous avez suivi le départ, puis les premiers résultats avec plus ou moins de retard du fait des *six heures* (prononcez ciseuuuuurrr svp, c'est plus classe) de décalage horaire. Plus ou moins car certains ce sont levés très tôt pour nous voir sur Youtube Archery TV, ou sur World Archery pour les résultats. Les matchs ont eu lieu et le bazar commençait sur les réseaux, j'en avais de partout, c'est bien !

IMG 6111IMG 4875Shanghai a bien changé, a tel point que je n'ai pas reconnu cette ville, cette météo. La ville était presque silencieuse, très propre, sa population respectueuse et calme. Avant c'était huit taxis bien cramés pour deux voiture de tourisme, et une foule désorganisée qui se rentrait dedans sans cesse. Maintenant, on ne voit presque plus de taxis. Ils ont été remplacés par les voitures de tourisme, européennes pour la plupart, et beaucoup sont de marques prestigieuses. Fini les Bouibouis de rue à la sauvette et à l'hygiène douteuse. Fini le grand Fake Market et les vendeurs de rue, la ville a fait un ménage monumental. Ce n'est cependant pas le seul repère que je ne retrouvais pas après deux ans d’absence. La météo habituellement proche des 80% d'humidité était cette fois à 0 ou 10% toute la semaine. Nous avons même vu le ciel bleu plusieurs jours d'affilée, ce qui est une première pour cette destination brumeuse et/ou polluée. La température était très agréable, entre 25 et 30°C. Je n'avais jamais vu ça à Shanghai, jamais ressenti ce calme et cette sérénité dans ces rues. Le changement est incroyable !

Comme dans toute compétition, il faut gérer le décalage horaire, gérer les temps d'attente et les temps morts. J'en profitais alors pour visiter des coins connus que les néophytes chinois devait découvrir, ou inconnus. "L'attraction" de cette année fût le dernier gratte-ciel du quartier Pudong "Shanghai Tour", après avoir été sur l'Oriental Pearl "Tour TV" et sur le SWFC « décapsuleur ». Cet ouvrage culmine à 632 mètres... L'ascenseur nous emmène au 128e étage en cinquante secondes, soit à la vitesse maximale de 74 km/h, et on ne sent rien. Parfois, la folie des hommes est fantastique du prodige qu'elle entraîne. Il ne faut cependant pas basculer dans le mode touriste, puisque nous ne sommes pas là pour ça, et le sérieux doit dominer avec des temps de repos et des temps d'efforts. L'effort n'est pas que dans l'arc, car chaque jour, nous marchions pas mal, environ dix bornes sans compter le tir. Merci L’Apple Watch, #Addict. C'est bien pour ce recaler, comme pour se faire du bien, simplement.

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La semaine avant le départ, j'étais cool. Mes arcs étaient en place après des heures de réglage. Je prépare toujours deux arcs pour les grosses saisons. Si tout s'enchaîne bien, je n'ai plus le temps de revenir sur le matériel entre deux compéts, je règle les deux comme des horloges dès le départ et je n'ai plus qu'à tirer sur les ficelles. Je n’interviendrai donc que sur la maintenance générale pour qu’ils restent performants sur plusieurs mois.

J'ai pu réaliser beaucoup de volume sur les semaines précédentes, et bouger, varier les plaisirs et les terrains. Avant le départ, ce n'était pas le moment de balancer des milliers de tubes, seulement quelques uns, tranquillement. J'étais bien. 

Avant le départ, j'étais comme un dingue, un enfant attendait son jouet... Une fois sur place, jet laaaaagggggg. Le décalage chinois te déglingue, clairement. Tu commences la journée à l'heure à laquelle tu te couches normalement. Ca m'aura rappelé les bonnes sensations pâteuses des quarts de nuit dans la marine... Interdiction formelle de me causer avant le deuxième café !

Pas d'entraînement le premier jour, quoique c'était tout à fait possible, mais nous avons marché dans les rues de la belle Shanghai, luttant tous contre le sommeil. Le lendemain, lundi, nous avions tous fracassé notre oreiller. Premier entraînement et j'étais bien dans le gaz niveau sensation. Plusieurs choses jouaient contre comme la position assise prolongée dans l'avion, le décalage horaire, et la température bien plus élevée que chez nous. Pas d'intervention mécanique donc, et pas d’inquiétude. C'est au deuxième jour de tir, lors de l'entraînement officiel, que j'allais trouvé plus de marques en grattant deux trois trucs sur mon arc. Les mains et doigts plus gros avec cette température, j'allongeais le Dloop de 2mm pour trouver un ancrage plus rapide et fiable. J'ajustais le mur avec un coup de synchro et corrigeant le détalo pour garder le groupement de flèches en cible. Magique ;-) #TropFacile

La suite, elle n'est pas si évidente que cela. Sur certaines compétitions qui se passent bien, on arrive à se lâcher complètement, le tir débridé en passant tout dans la détermination sans se poser de question. Cette semaine, il ne fallait sûrement pas faire cela pour toucher le 10 souvent. Shanghai se tire dans un stade fermé, une grande arène façon "donut", évidée par le sommet. Les vents s'engouffrent et viennent tourner jusqu'au sol. Conséquence, la force et la direction du vent change constamment, et cela porte réellement une incidence sur l'impact en cible. Cette année, le vent était particulièrement fort et changeant, surtout à partir des onze heures. Rien de tel pour ne pas se mettre en confiance ! 

En début de saison, je n'ai pas encore de "gros" scores à coucher sur le papier. Ce n'est pas en région Rhône-Alpes que je peux espérer rencontre une météo favorable à la perf' de dingo, c'est si rare que je suis plus souvent déçu de ne pas pouvoir, plutôt que d'être déçu de ne pas y être arrivé. C'est une différence énorme. Je comptais un peu sur Shanghai pour taper un gros score. Raté, les plus forts ont fait 707 sur les qualifications. Il en manque dix, clairement. 

Je n'ai pas encore la prétention de dire qu'à la première occasion je tirerai plus de 713, mon record de France, mais je compte rejoindre rapidement les 710, et à terme 715++ si toutes les conditions sont réunies. Pourquoi ? Juste parce que ça fait du bien de faire du beau tir à l'arc en enchaînant des pastilles à répétition, c'est bon pour la confiance.

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Sur ces qualifications, je réalise 699 points et me classe douzième, à huit points du premier. Avec 60 points sur ma dernière volée j'étais dans les huit. Mais je tire 56 seulement, ballotté de gauche à droite par ce vent très irrégulier. J'ai eu quelques 60, et quelques 59. J'ai aussi eu un 54 compliqué à négocier sur une volée rafaleuse qui me chahutait un peu trop. En deux volées, je perds 50% des points. Bilan : l'endurance de concentration est bonne pour tirer chaque flèche avec son intensité, et sa visée spécifique en fonction du vent. Ma nouvelle technique fonctionne bien et je ne dois pas tomber dans la peur d'un éléments extérieur perturbateur. Il peut me faire perdre deux points, mais pas quatre, ni six.

Avec ce classement, je ne prends pas une tête d'affiche tout de suite. J'aurai le temps de faire mes armes avant. Je n'avais pas de match en 48ème de finale car nous n'étions que 83 tireurs, et je rencontrais mon premier adversaire en 24ème. Dès les premiers tours, l'échec est possible tellement le niveau est serré. Avec ce vent changeant, l'écart se resserre d'autant plus. J'attaque avec un beau 27, 8,9...10 ! Je termine avec 60 et 144 points. Je n'avais qu'un point d'écart avant la dernière volée. Je gagne ce seul match individuel de la journée avec un excellent ressenti sur l’exécution du tir qui allait se confirmer par équipe, puis le lendemain…

L'après-midi était réservé aux éliminations par équipe. Dominique Genet, Fabien Delobelle et moi composions l'équipe, selon la règle simple des trois premiers tireurs des qualifications. Classés sixième, nous avons remportés nos deux matchs des huitièmes et quart de finale pour être dans le dernier carré. Ces deux matchs étaient vraiment bons, et toujours tirés dans les mêmes conditions météo. Contre la Colombie, nous avons lâchés quelques points pour terminer deux points en retrait de notre adversaire, 229 à 231. Sur le papier, c'était bien comme résultat, sur la forme aussi, il manquait juste un tout petit poil de réussite. De l'autre côté, les américains sortent aussi contre l'Inde et ils deviennent ainsi notre adversaire pour la médaille de bronze.

IMG 5616Vendredi, tirs individuels, jour de tonnerre. J'ai eu du mal à trouver le sommeil, j'étais excité comme une puce, je tournais en rond, comme depuis le début de semaine tel un lion en cage. Je suis parti avec un objectif, celui de donner le meilleur de moi dans l'attitude. Cette façon d'être sur un pas de tir, celle que j'avais beaucoup de mal à mettre en place avant dans le PJ Deloche V1, l'attitude positive. Un mélange de détermination, d'agressivité et de souplesse, trois points qui déterminent le rythme de tir. Un tir engagé déjà quelques secondes avant l'armement, un engagement qui se tient jusqu'à ce que la flèche touche la cible. J'ai pu le mettre en place, je n'avais pas le choix, car j'avais décidé de ne pas retombé dans les travers de mes vies précédentes.

PJ Deloche V2, ça fonctionne, et qu'est-ce que c'est bon !!! Sur chaque flèche, une intensité, une décision, pour faire un dix. Un match est très court, il faut être réactif, déterminé, fort et audacieux. Certaines volées, les trois flèches étaient visées pleine balle, pour faire 30 points. 30 points, volée parfaite, c'est très important pour prendre l'ascendant. Sur d'autres volées, je portais une attention maximale à mon environnement, de l'impact des flèches de mon adversaire en cible, ou des autres matchs, aux drapeaux, au ressenti du vent au pas de tir. Les conditions étaient les mêmes toute la semaine. C'était technique, super technique, voire stratégique. Je contre-visais au 8 pleine balle pour atteindre le dix, d'un côté ou de l'autre du jaune. Contre Roberto Hernandez le salvadorien en seizième, 147-144, puis contre Braden Guellenthien l'américain, 148-146, le coréen Choi, 147-146, ces matchs étaient sous haute intensité, mais pas sous tension. Je n'étais pas tendu, stressé, je voulais. Et j'en veux encore. 

Contre le coréen, j'avais atteint mon objectif de figurer parmi les huit du classement. Un vieux sentiment d'accomplissement pouvait alors m'envahir alors que je pensais "non, pas maintenant, continue mec, tu peux, tu dois, tu veux", et j'ai remporté ce match pour atteindre le dernier carré. Nous n'étions plus que quatre, je rencontrais mon vieil adversaire, celui contre qui je remportais ma dernière médaille d'or à Wroclaw en 2014, Reo Wilde. Nous étions classés premier et deuxième mondiaux à cette époque. Pour le "come-back", je n'avais pas peur de lui, classé ici premier des qualifications, il était très confiant sur l'issue du match si j'en crois son discours narquois. C'était serré, super serré. Lors de la dernière volée, des rafales, mauvaises et dangereuses. Elles pouvaient tout foutre en l'air. J'ai pris mon temps, lui moins, il paie son excès de confiance par un 28 alors que j'avais un point d'avance sur la dernière volée. Je tire deux 9 pour commencer, sous pression. Je devais tirer un 10 pour gagner, et un 9 pour le barrage. Ce regain de lucidité m'a fait regardé son score. J’ai pensé "rien ne peut être plus difficile que ce que tu as vécu, gagne". Pas de doute, exécution parfaite de cette flèche, 10, victoire et accès en finale = > médaille. Woohoo, me revoilà ! C'est beau.

Puis il y a eu l’après, à jouer entre la satisfaction et l’envie, deux ennemis qui se mènent une guerre infinie. Suis-je assez fort pour gagner ? Quelle doit-être ma stratégie ? Dois-je tout tenter pour gagner ? Ou bien est-ce autre chose ? Cette finale n’allait ressembler à aucune autre connue…

Le reste du vendredi, j’ai savouré ce parcours avec l’équipe de France. Les deux équipes hommes poulies et classiques allaient disputer un match pour la médaille de bronze, et j’étais porté par cette bonne dynamique. Nous allions marcher dans les rues d’une Shanghai toute neuve, au soleil, pour décompresser et pour retrouver un esprit bien ciblé sur la compétition du lendemain.

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Samedi matin, je tirais en troisième position dans l’équipe. Elle tourne très bien cette team. L’échauffement se passait sur un terrain annexe, orienté de la même façon que le terrain de finale. Cependant, à cet endroit, pas d’eau, et beaucoup plus d’exposition au vent. Je tirais bien, vraiment bien et je n’avais pas de doute sur le déroulement du tir une fois devant les caméras.

SHA17 X17 6183La compétition commençait et j’attaquais par un 9 gauche bien méchant. Un peu fort de café à mon goût, même si je peux avoir tendance à être à gauche dans ce genre de situation, je cliquais mon viseur en plus de l’anticipation que j’avais déjà placée. Il y en a eu cinq d’affilée, des 9 gauche, et pas un seul n’était “gauche”. J’ai rarement ressenti un tel bien être sur un terrain de finale, j’étais comme à la maison. Le tir était en place dynamique, solide, déterminé. J’ai donc placé une vingtaine de clics avant de toucher la gamelle. Une fois dedans, je n’en suis plus sorti. Avec un point moyen moins à l’écart du centre, peut-être aurais-je pu donner le sentiment de confiance supplémentaire à mes coéquipiers qui commettaient aussi quelques erreurs. Possible, l’histoire de chaque finale est une histoire très courte, ces matchs sont un clignement de paupières, soit ça engage bien, soit ça foire. Il suffit de rien pour faire basculer le match. Les USA étaient tout à fait prenables, nous n’avons pas pu capitaliser la confiance de notre côté, pas cette fois. Quatrième, c’est bien, ce sont deux matchs tirés en plus que si nous avions perdu en quart de finale. Donc, c’est de l’expérience, c’est de la pratique, c’est en bonne voie. Pour mémoire, il s’agissait de la première finale extérieure pour Fabien Delobelle, et un retour par équipe pour moi, bredouille depuis 2014. Ca va venir, c’est sûr, l’objectif principal est en octobre pour le mondial à Mexico… Ce qui ne nous empêche pas d’en gagner avant, j’en conviens, mes chers ;-)

Pour le croustillant, voici la finale individuelle de PJ, V2. A l’entraînement, il y avait beaucoup de vent. La température était lourde, assez écrasante, et une attente de quatre heures. Le tir était vraiment bon, je groupais, je tirais souple, simple, et rapide tout en restant précis. La finale arrive et je me dirige vers l’entrée de la porte d’accès au terrain. Tout comme le matin, tout comme à mon habitude, tout comme l’ont fait tous les autres concurrents depuis toujours, je portais ma paire de jumelles en bandoulière sans la masquer… J’aime bien la porter. Elle m’apporte une image de la cible vue depuis le pas de tir, au moment où je le souhaite, ne tombe pas en panne, ne subit pas les reflets du soleil, je lui fait confiance et elle me rassure. 700 grammes de confiance en plus, placés sur mon épaule d’arc, nous étions inséparables, PaLaPaPAaaa, musique DJ… Il fallait forcément un truc, c’est évident, sinon comment trouver de l’inspiration pour conter les histoires de Pierrot en Chine, hein ? Comment ? La musique de Rocky Balboa commence et l’instant T arrive, on me fait signe, “GO”, je rentre sur le terrain.

Poser l’arc, se placer à côté du juge, regarder le public et les autorités, entendre son nom, lever la tête en affichant un visage sans grimace et en faisant Coucou sous les applaudissements d’accueil, saluer le juge et son adversaire, prendre son arc en main, taper la main du coach qui nous centre sur le bon truc, attendre le TOP. Voilà, ça c’est le modus operandi du comment faire avant de tirer à l’arc suffisamment bien pour gagner une finale de manche de coupe du monde. C’est pas compliqué, c’est sympa, c’est un plaisir et cela fait partie du charme d’une finale. Cela permet d’entamer un match sereinement, en restant concentré sur l’objectif et le déroulement en toute sécurité devant des caméras, des photographes, pour la mise en valeur de notre sport.

JudgeIl fallait un truc. Je rentre sur le terrain et je passe devant le juge déjà placé au centre. Il me commande directement d’ôter ma paire de jumelles de l’épaule. “Jumelles interdites, il faut les enlever”. Ah bon, je les avais ce matin, Réo les avait sur le match qui vient de se terminer, un regard sur le coach, dubitatif et hésitant, sentiment que je partageais logiquement. Incompréhension, un peu abasourdi, je n’entendis pas l’appel de mon nom puisque j’écoutais les remarques du juge qui m’indiquait l’écran TV répétant l’image de mon blason. Je n’avais donc pas besoin de jumelles et c’était interdit par le règlement. J’ai donc lancé un coucou furtif du bras, ne sachant plus trop où j’en étais de ce modus operandi. Répartie in the pocket, mords ta langue, ça va passer, woosssaaaaaaa… Passer en mode rebel m’aurait valu peut-être un carton jaune, rouge, vert et rose, j’en sais rien. Réflexion faite, il ne fallait rien dire et s’exécuter. Je n’avais jamais été confronté à une remarque d’arbitrage en plein feu d’action. +Expérience+ ! Lors de nos divers stages et réunions, et de mon côté également, j’avais passé en revue toutes les modifications réglementaires pour me mettre à jour AVANT de partir en compét. Sauf l’interdiction d’accrocher le décocheur au Dloop en équipe avant d’entrer au pas de tir, rien n’apparaissait.

Imaginez maintenant le côté rebel, genre je ne quitte pas mes jumelles par ce que j’ai pas vu de modification, genre je ne crois pas en la spécialisation du juge. Je n’ai pas suffisamment de côté obscur de la force pour tenir le coup et faire du bon tir à l’arc. J’ai donc retiré mes jumelles, et j’étais comme un con. Super l’ambiance pour ton retour PJ, sinon, t’es content d’être là ?

Ca va Pierre, c’est qu’un accessoire. Et bien non, ce n’est pas que ça. Quand je vois le chemin parcouru depuis, et jusqu’à ce terrain de finale, des noms d’oiseaux très exotiques me viennent à l’esprit. Si j’imagine que la logique voudrait primer sur le détail soudain, l’ordre aurait pu ainsi avoir été commandé AVANT l’accès au terrain.

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Le match commence, je suis contre Stephan Hansen au fait. Il est là, il a du talent, beaucoup, il est numéro un mondial et il a gagné ce match. Son talent n’a d’égal que son arrogance. Rooo Pierrot… Ben oui, le monde n’est pas tout beau tout joli comme mon chat, c’est comme ça. Evidemment, je ne sentais plus ma paire de jumelles. Je peux très bien tirer avec ou sans, mais il me faut quand même quelques flèches pour m’habituer à la différence. Je ne les avais pas ces quelques flèches, et je devais rentrer dedans, de suite. Une image me venait alors à l’esprit pour vous illustrer mon sentiment à cet instant : imaginez vous en slip, sur scène, devant un public et des caméras. Le chef vous demande de retirer ce slip. Comment vous sentiriez-vous ? (J’imagine déjà la position de certains vantards, messieurs, modérez vos ardeurs !). 

IMG 5624Je n’ai pas perdu le match à cause d’une paire de jumelles, je tiens à le certifier. J’ai perdu ce match car il était à l’image de ma compétition toute entière : j’étais la transition du moi V1 au moi V2. Dans une transition, il y a un début et une fin. La fin est mieux que le début, enfin c'est ce que l'on cherche. C’est la version super simple de ce j’ai mis en place depuis plusieurs mois. J’ai commencé les qualifications par des tirs longs et coûteux. Je les ai terminé par des tirs rapides, déterminés et précis. Sur les éliminations, j’ai attaqué par 8, 9 dégueu puis 10. J’ai rythmé mes tirs, analysé l’environnement, et j’ai décidé de coller mes flèches dans la gamelle en bridant suffisamment mon arc pour qu’il n’ai pas le choix de faire autrement. J’ai terminé les éliminations par ces mêmes flèches, rapides et précises, qui me permettent d’être endurant dans le corps et dans la tête. C’est en situation que l’on progresse. 

La finale, c’était la semaine en timing réduit. La première volée était un mélange entre “il me manque un truc sur l’épaule” (mes jumelles donc), “où est-ce que je vise” (mes 9 à gauche du matin, hé oui), “ça fait longtemps dis donc” (dernière finale individuelle = Lausanne 2014). J’avais plein de monde dans ma tête à ce moment-là, tous pas d’accord… Deuxième volée, première flèche tenue dans une rafale qui ballote mon jouet, bien tirée, cordon qui prend pas, shit. Stephan se fait embarquer dans la même rafale, mais prend le cordon. Il crie woohoo, #FairPlay. Je tire un 8 bas, une flèche engagée, un peu précipitée. Le match est plié à cet instant là précisément, et toute la confiance se plaçait du côté danois. Il n’avait plus qu’à dérouler.

Pour vous situer un peu mieux dans ce qu'est une finale : le tir est alterné, commandé par les feux devant vous placés sur les chronos dans l'axe de la cible. Vous devez rester attentif au passage du feu au vert, et ne pas tirer avant. Pas de décompte, vous perdez donc une seconde ou deux le temps de comprendre que c'est à vous, et de lever l'arc. Il reste alors 18 secondes pour tirer avant la fin du temps imparti. Vous pouvez prendre une rafale, ou pas, vous devez gérer vos émotions plus vite, analyser plus vite, réaliser plus vite. C'est loin d'être un exercice facile. Vous avez donc une minute pour tirer trois flèches dans la situation la plus complexe alors que tous les autres matchs ont été tirés auparavant en deux minutes, sans alternance. C'est beau, mais c'est chaud, et ça se bosse. C'est pour cette raison précise que j'ai modifié des paramètres de mon tir, et que je vais poursuivre cette évolution.

IMG 5622Volée suivante, je me recentre sur ma stratégie de tir, celle que je veux mettre en place sur un terrain de finale, car j’y reviendrai. Cela me servira plus tard, je dois garder ces images en tête. J’arme et me place en visée. Stephan quitte le pas de tir soudainement en se précipitant sur son arc. Il s’était trompé de couleur… Il saisit son arc n°1 en laissant tomber l’autre sur l’estrade de bois sur laquelle nous étions. Bel exercice de concentration… J’ai tiré un X, puis deux 10, rapidement, exactement comme je voulais que ces flèches soient tirées. Parfait. Quatrième volée, dernière flèche, déjà deux X en cible, et un autre 8 arrive. La météo n’était pas très calme et le vent tournait. Il y avait une fontaine sur ma gauche, j’ai été “brumisé” sur cette flèche, et embarqué par la colonne d’air de la rafale. J’ai pu terminer par trois 10, bas, certes, mais 30 points tirés comme je le voulais, rapide, simple, précis. Cela peut paraître simple, comme démarche, mais il est très compliqué de faire quelque chose de simple. 

Je crois avoir compris que ce jour n’était “simplement” pas le mien, ni le nôtre. Ce ne sont pas ces vingt minutes qui vont remettre en question le reste de la semaine, qui elle, aura demandé des mois de préparation. Shanghai n’était pas un objectif en soi, je voulais des points, j’en ai plein. C’est cool ;-) 

Que je vous rassure : le juge en charge de ce match est venu présenter ses excuses à l’issue de la finale. Le port de cette paire de jumelles était bien autorisé, selon la World Archery. Le mal était fait, oui, car sinon il n’y aurait pas d’excuses. Alors je les accepte sportivement. Humainement,  la symbolique est bien trop grande et ce moment a été fracassé, c'est douloureux. Vous étiez nombreux à me suivre, à être heureux de me voir de retour si rapidement après toutes ces aventures que nous avons partagé, et tous ces aléas de vie que j’ai écumé. Je regrette profondément de ne pas avoir su mieux gérer mon apparition à l’écran pour vous montrer un visage plus radieux. Je ferai de mon mieux pour revenir sur ces finales en vous montrant ma joie de pratiquer le tir à l’arc avec passion, pour vous la communiquer tel un virus intraitable. Je suis en paix et ce ne sont là que des explications. Je ne me justifie pas. Je ne blâme pas le juge. Que chacun fasse son travail correctement, moi y compris. Je souhaite que les choses se passent bien, sans me faire marcher sur les pieds, sans être ni trop mouton, ni trop lion. 

C'était une belle semaine. Tous les évènements qui se sont produits n'ont eu que des effets positifs sur mes réactions, réfléchir, écrire, m'entraîner, travailler, m'amuser et planifier. Je ne suis pas ici pour me battre, je viens exprimer un art, celui d'être archer. Parvenir à cette expression est une récompense pour l'artiste, ou bien pour l'artisan. L'un façonne ses idées pour les réaliser aux yeux de tous, l'autre recherchera le geste parfait. Le but est commun : faire quelque chose de beau. Je suis heureux de revenir de loin, avec d'aussi belles choses déjà en poche. 

Ce classement conditionne ainsi ma sélection automatique pour les prochaines manches de coupe du monde, si j’arrive à rester dans le top 8 du classement général de cette compétition. Je serai donc à Antalya, et si tout va bien, à Salt Lake City et à Berlin. L’objectif sera de viser ma quatrième finale de coupe du monde à Rome en septembre. Le plus gros objectif de la saison reste le championnat du monde FITA à Mexico, en octobre. Il est loin, et tout près. Je dois rester concentré sur ma stratégie. Elle me plaît beaucoup, cette stratégie, et je suis heureux de porter mon arc plusieurs fois par semaine, quand mes travaux me laissent le temps d’en profiter. Mes entrainements sont réguliers, et me font beaucoup de bien. Ca, c’est du vrai bon tir à l’arc ! #IlsSontTropBeauxMesArcs #Spoil ;-)

Je participerai au championnat départemental à Villefontaine ce weekend, il y aura du vent, cela sera une bonne préparation pour Antalya. Le départ est programmé pour le dimanche 4 juin prochain. La compétition commencera le mercredi suivant, à suivre sur le site de la World Archery, et sur les réseaux sociaux. Vous pouvez aussi retrouver tous les résultats de nombreuses compétitions sur le site Ianseo.

 

Je suis heureux de vous retrouver ainsi et avec une médaille autour du cou. Vivement la suite !

A bientôt,

Archerycalement,

>>>---Pierrot---> X D

 

Les résultats sont visibles ici

Les photos ici. 

La vidéo de la petite finale par équipe (premier match). 

La vidéo de ma finale individuelle (temps à 1H30).

Crédit photo : Dean Alberga / World Archery / Sjef Van Der Berg / Moi

 

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